This year's 'Chaire Émile Lorand en littérature française' will be held by Professor Dominique Ninanne, Associate Professor at the University of Oviedo (Spain) since 2019. This chair will focus on 'L’engagement écologique dans la littérature belge de langue française'.
Anyone interested is welcome to attend and can directly contact Professor Sara Buekens, coordinator of the chair.
Résumé
L’objectif de ce cours est d’examiner comment les écrivains belges d’expression française, de la fin du XIXe siècle à l’époque contemporaine, problématisent les questions environnementales. Il s’agira de relire des œuvres consacrées, mais qui n’ont pas été analysées de ce point de vue-là, de découvrir des auteurs (dont certains moins connus) qui tirent leur inspiration de la nature et de s’intéresser à des auteurs (actuels) dont l’engagement écologique est explicite et affirmé.
En guise de préambule, le concept d’écopoétique (au sens de Schoentjes, 2015 ; Buekens, 2019) et les outils propres à cette approche de la littérature seront brièvement présentés.
Dans cette optique écopoétique, nous examinerons quels enjeux éthiques les textes (poésie, romans et nouvelles, essais) soulèvent et comment ceux-ci s’inscrivent dans des choix esthétiques. Ainsi, nous verrons comment les diKérents règnes de la nature (en particulier, le végétal et l’animal) sont représentés, mais aussi comment les écrivains expriment les rapports entre l’humain et la nature. Ces questions éthiques seront mises en relation avec le contexte historique et les courants littéraires des époques examinées et seront nourries de réflexions des penseurs de l’écopoétique, de l’écocritique et de l’écologie. Par ailleurs, nous analyserons comment ces problématiques prennent corps dans un travail formel de la langue (figures de style, focalisation, etc.).
Nous nous intéresserons d’abord aux écrivains « fin de siècle », dont la production littéraire accompagne la seconde révolution industrielle en Belgique. Nous montrerons comment une conscience environnementale surgit du constat de la dégradation des sites naturels. Nous verrons, dans ce cadre-là, comment des auteurs symbolistes et naturalistes comme Émile Verhaeren (Les Campagnes hallucinées, 1893 ; Les Villes tentaculaires, 1895 ; Les Forces tumultueuses, 1902), Camille Lemonnier (Un Mâle, 1885 ; Happe-Chair, 1886 ; Au cœur frais de la forêt, 1900), Georges Eekhoud (Les Milices de Saint-François, 1886 ; La Nouvelle Carthage, 1888) représentent la dégradation de la nature. Par ailleurs, ces mêmes auteurs, ainsi que Maurice Maeterlinck (L’Intelligence des fleurs, 1907 ; L’Oiseau bleu, 1909), font preuve d’un certain décentrement anthropocentrique dans leur célébration du vivant.
Ensuite, nous nous pencherons sur des textes de l’entre-deux-guerres : l’expérience de retour à la nature d’André Baillon dans En sabots (1922) ; la communion avec la nature dans les romans de Marie Gevers. Une attention particulière sera portée à Plaisirs des météores (1938) de l’autrice limbourgeoise. Nous nous intéresserons aussi à d’autres écrivains dits régionalistes tels que Louis Delattre.
Nous étudierons, pour l’époque de l’après-guerre, le réalisme magique de Paul Willems (La Chronique du cygne, 1949), le fantastique de Monique Wateau (La colère végétale, 1954) et le surréalisme de Christian Dotremont.
Nous rapprochant de l’époque contemporaine, nous lirons des textes qui saisissent le sensible de la vie de la nature : nous analyserons quelques fragments du recueil de poésie Les saisons (1979) de François Jacqmin et, parmi l’abondante production de Jean-Pierre Otte, nous aborderons L’amour en forêt (2001).
Enfin, une part importante du cours sera consacrée à l’engagement écologique des écrivains actuels :
- La dénonciation de l’exploitation de la nature : Deux kilos et demi de Gil Bertholeyns (2019) et Écume de Véronique Bergen (2023)
- La vision apocalyptique du monde dans Moi, Marthe et les autres d’Antoine Wauters (2018)
- La solidarité avec le vivant animal et végétal que déclinent les autrices Sandrine Willems (Les petits dieux, 2002 et À l’espère, 2008), Caroline Lamarche (Nous sommes à la lisière, 2019), Christine Van Acker (La bête à bon dos, 2018 et L’en-vert de nos corps, 2020)
- La possibilité d’un monde autre dans Autobiographie d’un poulpe et autres récits d’anticipation de Vinciane Despret (2021)
Plan programmatique :
- Première séance : approche écopoétique de la littérature ; le « progrès » au tournant du XIXe et du XXe siècle : contextualisation historique et littéraire
- Deuxième séance : perception de la dégradation de la nature et célébration du vivant par les écrivains « fin de siècle »
- Troisième séance : célébration du vivant par les écrivains « fin de siècle » (suite et fin) ; André Baillon ; les écrivains dits « régionalistes », dont Marie Gevers
- Quatrième séance : les écrivains dits « régionalistes (suite et fin) ; propositions du réalisme magique, de la science-fiction et du surréalisme : Paul Willems, Monique Wateau et Christian Dotremont
- Cinquième séance : l’expression du vivant chez François Jacqmin et Jean-Pierre Otte ; la dénonciation de l’exploitation de la nature par Gil Bertholeyns et Véronique Bergen et la vision apocalyptique du monde chez Antoine Wauters
- Sixième séance : la solidarité avec le vivant chez Sandrine Willems, Caroline Lamarche, Christine Van Acker ; la possibilité d’un monde autre selon Vinciane Despret.
Ce programme pourra être sujet à des modifications en fonction du déroulé du cours. Un dossier de textes sera fourni aux étudiants